Par akademiotoelektronik, 17/02/2023
Sauvé par l'Etat français, Air France-KLM peut-il acheter des Boeing 737 MAX aux dépens de l'Airbus A320 Neo ?
Air France-KLM va-t-il acheter des Airbus de la famille A320 Neo, des Boeing 737 MAX ou bien les deux types d'avions ? C'est la question qui se pose depuis que Ben Smith, le directeur général du groupe franco-néerlandais, a récemment dévoilé le lancement d'un appel d'offres auprès des deux constructeurs pour une commande de 160 avions moyen-courriers, des appareils d'une capacité allant de 150 à 220 sièges. Une commande pharaonique dont la valeur dépasse 16 milliards de dollars au prix catalogue. Un record pour le groupe depuis sa création en 2004 à la suite du rachat de KLM par Air France.
Boeing un avantage "naturel"?
L'issue de l'appel d'offres est incertaine. L'équation est en effet extrêmement complexe. Dans un monde "sans influence", Boeing aurait eu un avantage naturel dans la mesure où l'appel d'offres d'Air France-KLM vise à remplacer des B737 NG, mis en service au milieu des années 1990. En effet, il est destinéà KLM, sa filiale low-cost Transavia Holland, et Transavia France, filiale d'Air France, trois compagnies équipées uniquement de Boeing 737. Air France, n'est pas concernée par l'appel d'offres. N'opérant aujourd'hui que des avions de la famille A320, la compagnie tricolore a déjà fait ses choix de flotte moyen-courrier en faveur de l'A220, un avion plus petit que l'A320 ou le B737. Or, pour des raisons de coût de formation des équipages, d'optimisation de la maintenance, une compagnie qui renouvelle sa flotte a souvent intérêt à conserver le modèle d'avions qu'elle utilise déjà. Le B737 MAX étant un dérivé du B737 NG, il serait donc logique, sur le papier, qu'Air France-KLM passe commande à Boeing.
Le choix du Boeing 737 MAX est loin d'être évident
Pour autant, le choix du 737 MAX est tout sauf évident. Sans même parler de l'image déplorable qui colle à cet appareil à la suite des deux accidents mortels survenus en 2018 et 2019, dans lesquels la conception de l'avion a été mise en cause, il semble difficilement imaginable de voir Air France-KLM, un groupe français, sauvé de la faillite par l'Etat français (qui en a d'ailleurs profité pour monter jusqu'à 30% du capital du groupe), snober l'A320 Neo, le best seller d'Airbus que la terre entière s'arrache, pour acheter un avion américain pour la plus grosse commande de son histoire. Personne, en France tout du moins, ne le comprendrait. Ni l'opinion, ni les politiques, ni les employés d'Airbus, alors que la stratégie du gouvernement français en matière d'aides directes pendant la crise a justement été de privilégier les clients d'Airbus comme Air France plutôt que l'avionneur lui-même. Ceci dans le but de leur permettre de continuer d'honorer leurs commandes et d'apporter par ricochet de la charge de travail à toute la filière aéronautique. Ce fut le cas pour les A350, qui sont entrés en force dans la flotte d'Air France pendant la crise.
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En choisissant l'A220, Air France a opté pour un avion canadien
Un choix américain serait d'autant plus compliqué à faire passer dans l'Hexagone qu'il s'ajouterait à un autre choix, d'Air France cette fois, qui fait également grincer les dents de certains en France : celui de la commande de 60 A220, signée en 2019 pour remplacer une grande partie de la flotte moyen-courrier de la compagnie française, composée jusqu'ici d'A320 classiques. Un choix au détriment de l'A320 Neo. Sur le papier, aucun problème : il s'agit en effet de deux Airbus. Sauf que l'A220 n'apporte aucune charge de travail en France. Pour cause, cet appareil est canadien. Iln'est autre que l'ancien C-Series de Bombardier, assemblé près de Montréal avec peu d'industriels français à son bord. Racheté par Airbus en 2017, il a été rebaptisé avec un nom "airbusien". Passé sous les radars il ydeux ans grâce à l'habilité de Ben Smith, ce choix pour l'avion canadien ne manquerait pas de ressurgir. Car un achat de B737 MAX se traduirait par une absence totale d'Airbus de la famille A320 Neo dans la flotte du groupe. Autrement dit, l'avion qui génère de l'emploi en France serait exclu du renouvellement de la flotte moyen-courrier du groupe. Pas facile à faire passer politiquement.
Les Néerlandais très attachés à Boeing
Pour autant, difficile d'affirmer qu'Airbus a de fortes chances de rafler la mise. Car si Air France-KLM est un groupe français, coté à la Bourse de Paris, avec comme premier actionnaire l'Etat français, le poids de l'influence néerlandaise est colossal au sein du groupe. Et au regard des équilibres complexes à trouver entre Air France et KLM, mais aussi entre les Etats français et néerlandais, il faudra composer avec le camp batave. Or, ce dernier est très attaché à Boeing, rappelle une source interne. Transavia France l'est moins dans la mesure où la stratégie du groupe d'avoir deux types d'avions pour Air France et Transavia (pour avoir une étanchéité entre les deux compagnies), a volé en éclats depuis l'arrivée aux commandes de Ben Smith. Ce dernier a négocié plusieurs accords avec les pilotes d'Air France leur assurant qu'ils ne perdraient rien au change en développant une offre low-cost. Les pilotes de Transavia sont ceux d'Air France et ont donc la double qualification, Airbus et Boeing. Passer à une flotte Airbus pour Transavia France ne poserait donc pas de problème.
Une commande panachée entre Airbus et Boeing ?
Au final, certains observateurs parient sur un panachage de la commande entre les deux constructeurs : des Airbus de la famille A320 Neo pour Transavia France, et plus précisément des A321, la version la plus capacitaire, et des Boeing 737 MAX pour KLM et Transavia France. A partir de 50 appareils, toutes les compagnies du groupe génèrent des économies d'échelle, explique un expert.
Pour autant, un dernier élément vient complexifier l'équation. Et non des moindres, puisqu'il s'agit du prix des avions. Air France-KLM va logiquement vouloir obtenir les meilleurs prix. Or, à ce jeu-là, Boeing sera le plus à même de baisser les siens. Après les déboires du 737 MAX, le géant américain doit en effet engranger les contrats, qui-plus-est avec des Majors du secteur, pour rassurer le marché.Depuis la remise en vol du MAX, Airbus s'est quant à lui fixé une ligne de conduite : ne pas lancer de guerre tarifaire pour ne pas entraver la relance commerciale de son rival, alors que son carnet de commandes déborde. Car, plus que tout, Airbus redoute que la part de marché de Boeing s'écroule à un niveau tel que l'avionneur américain soit obligé de lancer un nouvel appareil sur le segment moyen-courrier.Une décision qui obligerait à riposter et à lancer un successeur de l'A320 Neo bien avant 2035 comme prévu jusqu'ici. Un avion qui n'aurait donc pas toutes les performances attendues en termes de réduction des émissions de CO2. De là à ce que cela soit suffisant pour qu'Airbus lâche le contrat Air France-KLM. Dans une compétition, personne n'aime perdre une partie. Encore moins à domicile.
Lire aussi 5 mnAirbus ne lancera pas de guerre tarifaire contre le Boeing 737 MAX pour ne pas l'achever
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Pour la première fois depuis le début de la crise, le groupe ne brûle plus de cash
La perte d'exploitation d'Air France-KLM a été une nouvelle fois très lourde au deuxième trimestre (-752 millions d'euros). Mais, en raison de la progression de la vaccination et la prise de réservations pour la saison estivale, elle est inférieure à celle du premier trimestre (-1,2 milliard d'euros). La perte nette est du même niveau : 1,5 milliard d'euros, mais est impactée négativement par des éléments exceptionnels, dont un changement de régime de retraites chez KLM.
Surtout, les "premiers signes de la reprise" depuis juin ont été constatés par la direction qui pense retrouver une rentabilité opérationnelle au troisième trimestre. La direction a indiqué avoir constaté les "premiers signes de la reprise" depuis juin et pense retrouver une rentabilité opérationnelle au troisième trimestre.
Le groupe a retrouvé un flux de trésorerie libre positif pour la première fois depuis le début de la crise "grâce à de très bonnes ventes de billets", a expliqué le directeur financier, Steven Zaat. Avec la levée de certaines restrictions de voyage, l'adoption du certificat sanitaire européen et une "forte demande" vers les destinations de vacances notamment en Europe du Sud, Air France-KLM a porté son offre en sièges en juillet à plus de 60% de la même période de 2019. En conséquence, le groupe a amélioré ses hypothèses de trafic pour le troisième trimestre, entre 60 et 70% des niveaux d'il y a deux ans (contre 55-65% précédemment), Le groupe s'est en revanche gardé de communiquer ses ambitions pour le quatrième trimestre, "en raison de l'incertitude sur la réouverture de l'Atlantique Nord pour les citoyens européens et de l'incertitude concernant la levée des restrictions de voyage".
Fabrice Gliszczynski8 mn
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