Par akademiotoelektronik, 02/03/2023
Jihadistes, paramilitaires… l’inquiétante utilisation des drones par les groupes criminels
C'est un phénomène en constante progression et qui inquiète les états-majors et services de sécurité. Les jihadistes, groupes criminels et paramilitaires s'emparent du drone comme arme létale, à l'image de la tentative d'assassinat contre le Premier ministre irakien. Moustafa al-Kazimi est sorti indemne dimanche d'une attaque aux drones piégés, comme avant lui, le président socialiste vénézuélien Nicolas Maduro, victime en 2018 d'un attentat manqué attribué à l'opposition.
"Cela confirme ce que l'on savait déjà : les attaques à courte portée sont de plus en plus viables, pas très difficiles à financer ni à organiser techniquement, et potentiellement assez précises", résume Michael O’Hanlon, chercheur à la Brookings Institution. Ces dernières années, toutes les armées du monde se sont interrogées sur l'usage des drones dans leur arsenal. Mais aussi sur le risque de voir cette arme proliférer au sein de groupes non-étatiques, d'autant plus facilement que les drones sont en vente libre ou presque.
Jean-Marc Rickli, directeur des risques globaux et émergents au Centre de politique de sécurité à Genève (GCSP), souligne à cet égard "l'importance croissante des technologies à double usage, c'est-à-dire des technologies commerciales utilisables à des fins militaires". L'expert constate un usage de plus en plus large de cet outil contrôlable à distance depuis l'attentat ciblé, criminel ou terroriste, jusqu'à l'attaque en bonne et due forme avec des essaims de drones. Un ciel brusquement saturé de petits engins habiles, rapides et dont le vol est coordonné.
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Comme lors de l'opération lancée par les rebelles Houthis au Yémen contre des installations pétrolières en Arabie saoudite, en 2019, après mise en échec des systèmes saoudiens de défense aérienne. "On trouve sur le marché des drones faits pour ce type de mission", constate Jean-Marc Rickli, évoquant des petits drones chinois capables de voler en essaim ou des Kalachnikovs russes, équipées d'ailes, "un AK47 volant, vendu comme arme anti-drone mais utilisable à des fins offensives".
Dans le cas irakien, "trois drones" auraient été lancés, selon les sources sécuritaires. Deux ont été abattus mais le troisième a pu faire exploser sa charge. L'Iran a condamné l'attaque, mais la République islamique compte parmi les suspects, selon nombre d'analystes, d'autant qu'elle compte notoirement parmi les puissances régionales qui ont su développer le secteur.
Une menace qui croît
"L'attaque de drone semble confirmer des tendances récentes démontrant la volonté de l'Iran de mener une action armée contre des adversaires régionaux", soulignait lundi matin le Soufan Center, institut privé américain d'analyse militaire et stratégique. À terme, au Moyen-Orient comme partout ailleurs, les drones vont sans aucun doute pénétrer et faire bouger le quotidien de la guerre, des conflits asymétriques et du terrorisme international.
L'exemple irakien "souligne la potentielle utilisation (des drones) dans les assassinats ciblés", analyse Jeremy Binnie, spécialiste de défense au Moyen-Orient pour la publication spécialisée britannique Janes. "La menace croît, alors que les composants deviennent de plus en plus efficaces, permettant aux entreprises d'augmenter la charge utile que l'appareil peut porter", pour le plus grand intérêt des insurrections et autres groupes jihadistes, constate le chercheur.
En face, la défense s'organise mais reste à la traîne, concentrée en particulier sur le brouillage des ondes de commande, des images ou des fréquences des GPS utilisées par les drones d'origine civile.
Fort potentiel disruptif
Schématiquement, un drone est guidé par trois canaux : radiofréquence, réseau télécom (4G, 5G), ou coordonnées GPS préprogrammées, résumait récemment une source sécuritaire en marge de Milipol, le salon de la sécurité intérieure des États, près de Paris. De plus en plus de services de protection des personnalités s'équipent de systèmes de brouillage de ces canaux. "C'est comme si on criait plus fort que l'opérateur du drone, qui se retrouve paralysé", le temps de mettre la cible à l'abri, expliquait-elle.
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Les années à venir devraient voir le problème s'accentuer avec un très fort potentiel disruptif car à chaque type de drone doit répondre une formule tactique défensive adéquate. Quant aux systèmes cinétiques traditionnels - missiles, arsenaux anti-aériens - ils sont "considérés comme inappropriés pour la défense (anti-drone) dans les zones habitées", rappelle Jérémy Binnie.
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