Par akademiotoelektronik, 03/03/2023
PMA pour toutes: y aura-t-il des premières conceptions "avant fin 2021", comme le souhaite Véran?
Pour les femmes qui voudraient se lancer dans une PMA, une fois que la loi sera mise en application, plusieurs semaines voire mois seront nécessaires pour réaliser une tentative. Et le taux de réussite est faible.
Après deux ans de travaux, le Parlement a adopté définitivement mardi le projet de loi de bioéthique et sa mesure phare d'ouverture de la Procréation Médicalement Assistée à toutes les femmes, une promesse de campagne d'Emmanuel Macron. A moins d'un an de la fin du quinquennat, les textes d'application ont été préparés afin "que des premiers enfants puissent être conçus avant la fin de l'année 2021", a promis le ministre de la Santé Olivier Véran.
Une promesse sur le court terme qui pourrait être difficile à réaliser, car si des milliers de femmes pourront bénéficier avec succès d'une PMA dans les mois et années à venir, le parcours est long et peut être semé d'obstacles, sans compter que les chances de réussite sont limitées.
· Quelles sont les techniques utilisées pour la PMA?
La PMA "consiste à manipuler un ovule et/ou un spermatozoïde pour favoriser l’obtention d’une grossesse. Elle permet de palier certaines difficultés à concevoir, sans nécessairement traiter la cause de l’infertilité", explique l'Inserm. La loi votée mardi élargit son accès aux couples de femmes et aux femmes célibataires, qui ne présentent donc pas forcément de problèmes de fertilité. Différentes techniques sont utilisées, avec des coûts et des taux de réussite variables.
L'insémination artificielle consiste "à mettre en rapport un ou deux ovocytes obtenus par stimulation ovarienne et des spermatozoïdes introduits directement dans l'utérus", explique le site de l'Assurance Maladie. Il sont introduits avec le bon "timing puisque l'on contrôle l'ovulation de la femme, et on la maximise", explique à BFMTV.com Michael Grynberg, chef du service de médecine de la reproduction et préservation de la fertilité à l’hôpital Antoine-Béclère (Hauts-de-Seine). Si grossesse il y a, elle est donc d'une certaine façon naturelle.
La Fécondation in vitro (FIV) est elle, "plus lourde, mais plus efficace", explique le médecin. Contrairement à l'insémination artificielle, lors de laquelle l'embryon se crée dans le corps de la future mère, avec cette technique il est réalisé en laboratoire. Un ovocyte est fécondé par un spermatozoïde, puis l'oeuf fécondé est implanté dans l'utérus.
Des variations de ces techniques existent, et il y a également des possibilités de préservation de la fertilité, comme la conservation des gamètes, soit conserver des ovocytes et spermatozoïdes pour une grossesse potentielle plus tard. Il est aussi possible de conserver des embryons, par exemple lors d'une FIV qui en aurait donné plus que ce qu'il est autorisé d'introduire.
· Quel parcours?
Le parcours pour arriver jusqu'à l'acte, qu'il s'agisse d'une FIV ou d'une insémination artificielle, "est d'une certaine lourdeur, pour le corps, mais aussi psychique", prévient Michael Grynberg. Et en particulier pour la femme, qui va devoir passer par un procédé de stimulation ovarienne, soit un traitement hormonal pour avoir la meilleure ovulation possible.
Avant d'en arriver là, des consultations chez le gynécologue ou différents spécialistes sont nécessaires pour évaluer l'état de santé des patients, et la meilleure technique à adopter. Ensuite peut commencer le traitement pré-PMA, dans lequel s'inclut la stimulation ovarienne.
Lors du traitement de stimulation ovarienne, "des effets indésirables transitoires sont fréquents: bouffées de chaleur, douleurs abdominales, saignement vaginal, prise de poids", explique Ameli.fr, ajoutant que cela peut aller jusqu'à des symptômes plus graves, pour lesquels il faut consulter un médecin urgemment: "gonflement et douleurs abdominales violentes, prise de poids brutale, troubles digestifs".
L'insémination oo la FIV se réalise ensuite au meilleur moment du cycle. Ces étapes peuvent prendre plusieurs semaines comme mois, en fonction des patients. En cas d'échec, il faut patienter avec un nouvel essai. "Les couples ont parfois le sentiment d’une perte de temps, mais le corps doit se reposer", explique à Santé Magazine Dr François Olivennes, gynécologue et spécialiste de l’infertilité. "Il faut attendre deux ou trois mois entre chaque FIV. On ne peut pas aller plus vite".
· Quelles chances de réussite?
Les réussites de ces techniques sont variables, mais globalement assez faibles, "moins de la moitié des couples qui arrivent pour une PMA ressortent avec un enfant", explique Michael Grynberg.
Selon les données de l'agence de biomédecine, en 2015, "54.167 tentatives d’insémination artificielle ont conduit à la naissance de 6188 enfants" et 62.230 tentatives de fécondation in vitro (y compris avec don de gamètes) ont permis la naissance de 18.651 enfants". Respectivement, cela représente 11 et 30% de réussite en France. Ces chances de succès varient selon la technique utilisée et le profil des patientes.
L'âge joue ainsi dans la réussite de la PMA. "Au-delà de 38 ans, il est fréquent de passer rapidement à la FIV qui offre de meilleures chances de succès", note l'Inserm. D'autre part, "les actes de procréation médicalement assistés sont pris en charge jusqu'au 43e anniversaire de la femme", explique l'Assurance Maladie, car les chances de réussite après cet âge sont beaucoup plus faibles.
· Quel coût?
Aujourd'hui en France, l'assurance maladie française prend en charge 100 % des frais liés à une PMA, ce dans la limite de six inséminations artificielles et de quatre fécondations in vitro. Les tentatives supplémentaires sont à la charge des patients. A l'étranger, le coût peut grimper à plusieurs milliers d'euros par tentatives, selon le pays et la méthode utilisée.
En France, d'après une évaluation de la Haute Autorité de la Santé, datée toutefois de 2011, un cycle d’AMP est tarifé entre 2545 et 3019 euros dans le secteur public par l'assurance maladie. Le centre de PMA de Franche-Comté affiche des prix allant de 1200 et 1400 euros par cycle de stimulation, mais il est précisé que le coût "est très variable d'une patiente à l'autre car il est en fonction du médicament choisi, de sa dose et de la durée du traitement". De plus, les examens en amont et les coûts des médicaments inducteurs de l’ovulation ne sont pas pris en compte dans ce calcul.
· Des grossesses rapidement?
Ce parcours, déjà long et éprouvant, peut être retardé par d'autres facteurs, comme par exemple la nécessité d'un don de gamètes, ovocytes ou spermatozoïdes. L'offre est bien moins importante que les demandes en France, et ces dernières risquent d'augmenter avec les couples de femmes ou femmes célibataires qui auront besoin de dons. L'attente peut déjà aller aujourd'hui de 12 à 18 mois, souligne Michael Grynberg donc pour le moment, les futures patientes ont "surtout le droit de se mettre sur liste d'attente".
Sur le même sujetEn ce sens, la promesse d'Olivier Véran de premières grossesses d'ici la fin de l'année 2021 pourrait être difficile à tenir. Entre le fait qu'il n'y a pas encore de décret d'application de cette loi, les chances de réussite d'une PMA ou encore le peu de dons de sperme, pour Michael Grynberg dans ce laps de temps, "cela arrivera possiblement, mais pour un nombre très limité de femmes".
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