Podle akademiotoelektronik, 17/06/2022
Meta et les supercalculateurs, pour quoi faire ?
Meta, la société de Mark Zuckerberg qui possède entre autres Facebook et Instagram, a annoncé toucher au but avec son « research supercluster » (RSC), un supercalculateur. La machine devrait être opérationnelle dans la deuxième moitié de l’année, a-t-elle annoncé lundi 24 janvier. Pour l’entreprise, ce supercalculateur servira au développement du métavers, univers virtuel cher au patron de Meta.
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L’objectif est de construire des modèles d’intelligence artificielle permettant, par exemple, une traduction instantanée d’échanges vocaux entre les utilisateurs. De quoi tenir une réunion multilingue dans un café virtuel ! Autre usage avancé par Meta : une meilleure modération des vidéos, avec une intelligence artificielle capable de reconnaître plus rapidement et plus efficacement des contenus problématiques.
Calcul haute performance et intelligence artificielle
Comment ? Par une force de frappe informatique. Un supercalculateur fonctionne grosso modo comme un énorme ordinateur. Ou plutôt comme beaucoup d’énormes ordinateurs reliés en parallèle. « Ils servent pour résoudre des problèmes comme la météo, la fusion nucléaire ou encore la modélisation de nouvelles molécules contre le Covid-19. Ces dernières années, on les utilise aussi pour l’intelligence artificielle », décrypte Bérenger Bramas, spécialiste en calcul haute performance au centre Inria de Nancy.
« L’IA mobilise d’énormes volumes de données et des traitements de plus en plus importants, indique Pierre-François Lavallée, à la tête de l’Institut du développement et des ressources en informatique scientifique (Idris). Un algorithme va analyser chaque donnée, donc si vous avez cent fois plus de données, il va prendre cent fois plus de temps. Idem si vous conservez la même quantité de données mais que vous souhaitez une analyse cent fois plus précise. » « Les modèles climatiques par exemple nécessitent des supercalculateurs et restent pourtant loin d’être aussi fins que souhaité pour correspondre à la réalité », appuie Jacques-Charles Lafoucrière, responsable du calcul haute performance au CEA.
7,6 millions de cœurs de silice
Meta, riche de plus de trois milliards d’utilisateurs, a bien des données à éplucher. Face à cette explosion d’informations et à la complexité accrue des algorithmes, le matériel doit suivre. Pour l’instant, le plus puissant supercalculateur au monde s’appelle Fugaku et il est japonais. Il comprend 7,6 millions de cœurs pour effectuer des calculs, là où, à titre de comparaison, les ordinateurs de bureau en comptent entre 2 et 12.
Selon les ingénieurs de Meta, la puissance du RSC le place en première position dans le palmarès des capacités de calcul. « La configuration avancée pour ce supercalculateur est de très haut niveau, confie Jacques-Charles Lafoucrière. Le communiqué évoque une puissance de calcul identique à celle qu’on attend dans les prochaines années. » Ce « Graal » porte le doux nom de « supercalculateur exaflopique » en bon français. Une telle machine qui serait capable d’effectuer 1018 opérations à la seconde, soit un milliard de milliards.
« Un supercalculateur de ce type sera probablement américain ou japonais, estime Bérenger Bramas. L’Europe a beaucoup de supercalculateurs mais ne cherche pas à avoir le plus puissant de tous. La stratégie a plutôt été de répartir les efforts, pour faire avancer de nombreux domaines de recherche. » En pratique, rien n’empêche un « supercalculateur exaflopique » de voir le jour, « mais cela n’a pas été mis en service en raison d’une très grande consommation d’énergie », reprend Jacques-Charles Lafoucrière. « La recherche vise justement à améliorer la capacité de traitement sans élargir l’enveloppe énergétique ».
Des monstres énergétiques
Avec un appétit équivalent à celui d’une petite ville, le coût économique et environnemental des supercalculateurs est non négligeable. Une telle consommation induit aussi une grande émission de chaleur. À l’Idris, au sud de Paris, la chaleur produite par les 43 tonnes du supercalculateur français Jean Zay est déjà réutilisée pour chauffer le bâtiment de l’Idris et alimentera bientôt plus de 1 000 logements du plateau de Saclay.
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L’autre problème est plus technique et dépend des lois de la physique. Sans entrer dans les détails, regrouper un grand nombre de cœurs de calcul nécessite une miniaturisation et donc des gravures de circuits imprimés de plus en plus fines. Or, en dessous d’une certaine limite, l’informatique tombe dans le monde de l’infiniment petit, celui du quantique. Une tout autre histoire.
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